Les systèmes de retraite
Situation en 2010

Les systèmes de retraite ont commencé à être mis en place à la fin du 19è siècle. Le premier fut celui du chancelier Bismark en Prusse dans les années 1880-1890. Ces systèmes se sont développés avec l'amélioration du niveau de vie permis par la croissance économique. Le mouvement fut ralenti voire interrompu durant la période 1914-1945 - deux guerres mondiales séparées par la crise économique de 1929; les systèmes de retraite des salariés se développèrent avec la croissance économique de l'après 2è guerre mondiale et les 30 glorieuses. Au total la production entre 1900 et 2010 a été multipliée par 10. Le volume de la production de biens et de services, de l'emploi et de la consommation, sa croissance et sa répartition dans les différents segments de la population, sont les éléments de base de tout système de retraite; il en est de même du système de santé, de l'éducation, des infrastructures collectives. Tous ces systèmes sociaux essentiels pour le bien-être de tous, reposent sur la production et la consommation des biens et des services. Ils doivent donc être financés par des prélèvements sur la production cad. une épargne - réduire la consommation immédiate et la reporter à plus tard. Il en est de même de l'épargne prélevée pour accroître les investissements productifs afin de produire plus, et du fonctionnement et des investissements des services publics - santé et éducation - ainsi que pour l'accroissement des infrastructures publiques qui servent à accroître la production future en volume ou en qualité de service.

Pour financer les retraites, deux modalités; la répartition - les actifs paient les prestations des retraités par un système de cotistions partagées entre salariés et entreprises; l'impôt - les retraites sont financées par l'impôt. Et dans les deux cas, les ménages peuvent constituer un complément de ressources par des systèmes de capitalisation. Le système par répartition est celui mis en place du temps de Bismark. Le système par impôts est celui dit de Beveridge mis en place en Angleterre après la 2è guerre mondiale. Ce dernier donne à tous une retraite égale mais faible que les Anglais complètent par de la capitalisation.

Sur quels leviers agir pour assurer l'équilibre des systèmes de retraite

Les retraites sont un renoncement à consommer la totalité des revenus pendant la période d'activité, pour pouvoir consommer pendant la période d'inactivité de la vieillesse. La retraite est un revenu différé, par prélèvement de cotisations obligatoires et/ou d'épargne volontaire.

L'équilibre du système dépend des recettes de financement (cotisations), de l'âge de départ (durée du travail et de la durée des cotisations), et du montant des retraites. Si les partenaires au système veulent assurer un montant des retraites donné - exprimé en pourcentage du revenu d'activité - il ne reste que deux leviers pour préserver l'équilibre mis à mal par le vieillissement et l'allongement de la durée de vie en bonne santé: l'âge de départ et les recettes de financement du système.

Mais une partie des pensions versées aux retraités n'est pas couverte par des cotisations sur les salaires; il s'agit des divers avantages comme les suppléments pour enfants - 10% dans certains régimes mais pas tous, les périodes de chômage, de maladie ... Le COR dit que l'impact sur la totalité du financement des régimes est difficile à évaluer; mais ils avancent une estimation de jusqu'à 20%. Ces avantages doivent-ils être couverts par les régimes de retraites, ou par la solidarité nationale, cad. l'impôt?

L'âge de départ dépend de 2 éléments:

  • l'âge légal auquel on peut prendre une retraite à taux plein proportionnée, et à condition d'avoir suffisamment cotisé, cad. un nombre fixé de trimestres de cotisation; si ce nombre de trimstres n'est pas atteint, on peut prendre sa retraite mais elle subit une décôte calculée en fonction du nombre de trimstres manquants;
  • l'âge maximum à partir duquel la retraite n'est plus soumise à décôte en cas de nombre de trimstres insuffisant; mais la retraite reste proportionnée à ses cotisations;

Ces éléments affectent le niveau de dépenses du système, en faveur des retraités, tant du régime général de la sécurité sociale CNAV caisse nationale d'assurance vieillesse, que des régimes complémentaires à points qui se calent sur les conditions fixées par le régime général. Les partenaires sociaux et l'État peuvent donc agir sur l'âge de départ en jouant sur les deux sous-leviers de l'âge légal et du nombre de trimestres de cotisations. Quant aux recettes du système, elles dépendent des cotisations sur les salaires payés par les entreprises et par les salariés sur leur salaires bruts. Mais d'autres sources de recettes peuvent être envisagées: taxation du capital, CSG, ou TVA spéciale appliquée au financement des retraites.

Les liens de gauche permettent d'y voir plus clair.

La situation en cet automne 2010

Le gouvernement a mis l'accent sur l'âge de départ: 62 ans au lieu de 60 pour l'âge légal à partir duquel on peut faire valoir ses droits; 67 ans au lieu de 65 pour l'âge maximum.

L'opposition des syndicats joue sur ces deux mesures "symbole" car le droit à la retraite à 60 ans plutôt que 65, est jugée comme une avancée sociale accordée en 1981 par Mitterand; une demande que les français formulaient depuis 20 ans avant. Un demi siècle - 1960-2010 - La retraite à 60 ans est une des conséquences des 30 glorieuses, 3 décennies d'après la 2è guerre mondiale où la croissance fut en moyenne de 4.5%/an soit presque un quadruplement de la richesse par rapport à l'immédiat "après guerre". Les retraités étaient devenus relativement "riches" par rapport à leur situation d'avant la guerre.

Mais cette croissance se ralentit durablement dès la fin des années 1970, le chômage s'établit à #10% et le déficit structurel à #3% du PIB. En 1993, la réforme Balladur avait modifié très fortement le régime des retraites; la durée de cotisations nécessaire pour avoir une retraite à taux plein est passée de 150 trimestres à 160 (37.5 ans à 40 ans); le salaire moyen de référence, base du calcul de la pension est calculé sur les 25 meilleures années et non plus sur les 10 meilleures; et l'augmentation des pensions était calée non plus sur l'indice des salaires mais sur l'indice des prix. Autrement dit, on garantissait aux retraités le maintien de leur pouvoir d'achat lors de leur départ en retraite, mais plus des gains liés à l'accroissement de productivité des actifs. Depuis la réforme en 1993, l'écart entre la hausse des prix et la hausse des salaires est estimée à 20%. La réforme Balladur a donc joué sur les 3 leviers, âge de départ lié aux cotisations et montant des pensions.

En 2003, la réforme Fillon va plus loin (lien).

En 1993 comme en 2003, les partenaires espéraient que la croissance économique (en production et productivité) contribueraient à assurer la pérennité des systèmes de retraite. Malheureusement cela ne s'est pas réalisé; la croissance a été plus faible qu'espérée, le chômage est resté proche des 10%; et la crise financière et économique de 2007-2009 est venue aggraver le déficit et la dette du pays. La croissance de la productivité est insuffisante, c'est ce que j'ai montré dans cet article (lien).

Il me paraît difficile d'assurer la pérennité de notre système sans toucher aux 3 leviers. Allonger la période d'activité, accroître les cotisations et leur durée, baisser les pensions des retraités par des prélèvements plus élevés de CSG sur les pensions. Je parie volontiers que le gouvernement agira sur les 3 leviers dans les années qui viennent.

Mis à jour le 09/09/2010      facebook